Dans l’interview de Catherine VINCENT, Michel SERRES regrette que la Vie et la Terre n’aient pas été invitées à Copenhague. Pour désigner notre terre, l’air, l’eau, le feu et les êtres vivants, il propose le terme de « Biogée« .
Cette idée me semble proche d’un autre concept que l’on oublie dans les débats actuels : l’entropie . Quel autre concept pourrait couvrir à la fois les problèmes de CO2, de biodiversité, de mécanismes financiers, de multiplication des êtres vivants, de croissance versus décroissance ?
Récemment, une amie m’accusait gentiment d’utiliser ce concept typique des ingénieurs pour épater la galerie. Mais je l’ai rassurée (ou inquiétée ?) en lui avouant que je suis moi même loin d’avoir fait le tour d’un concept aussi riche. Si seulement nous pouvions nous arrêter de courir et prendre quelques jours pour réfléchir sereinement aux nouveaux éclairages que cette notion pourrait nous apporter pour faire face aux défis de notre si belle planète . . .
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andré elleboudt
En appui à la Biogée de Michel SERRES
Connaissez-vous Beynac?
Un château étonnant, dominant la Dordogne. Connaissez-vous Beynac? Un château fabuleux, dominant la Dordogne. Rivière chaleureuse, Espérance a-t-on dit. Connaissez-vous Beynac? Un site grandiose, cent dix mètres plus haut que rivière Espérance. Rivière paresseuse, rivière courageuse qui un jour décida de tout déposer là! Et comprenons-le bien!
Elle arrêta tout là, non pas comme glacée, figée par un grand froid. Elle arrêta tout là, sans courant ni mouvement, et si vous décidiez d’un jour y patauger, votre corps y plongeait comme dans un corps inerte; figée mais non gelée, transparente et mouvante, apparence émouvante, sans saveur ni couleur… La Dordogne était là, immobile, arrêtée.
Etonnant que cela. Il n’y a pas longtemps que cela s’est passé. Et personne ne l’a su!
Des savants assemblés, des débats endiablés ont accouché de mots. Rien ne pouvait expliquer, les mots cachaient les maux. Du cœur même de la vie, le cœur semblait noué. Existant, mais sans vie. Loin de là, sur les bords de l’Oder, et plus près de chez nous tout le long de l’IJzer, au fil du Rhin, du Wal, tout au fond de la Meuse et de la Moskova, l’eau, courant, a douté et puis s’est arrêtée… Les alvins, les saumons, les truites et les brochets, toutes et tous à la suite, plus aucun n’a nagé. Ils étaient morts noyés…
Etonnant tout cela. Il n’y a pas longtemps que cela s’est passé. Et personne n’y a cru!
Les savants ameutés, gouvernants apeurés; des débats enroués ont accouché de mots, amertume et panique, inconscience et puis peur, angoisse et…REAGIR. De l’OTAN à l’ONU, de sigles et de symboles, ils se sont attablés. Il fallait REAGIR. Mais personne n’a songé, et pas un n’a pensé marcher dans les vallées, remonter les ruisseaux et interroger l’eau. Et puis de toute façon… qu’eut-elle donc pu nous dire, engluée qu’elle était de rancœur et de peine? Car tous, ils l’ignoraient. L’eau qui peine se tait, l’eau qui souffre se ferme. Tel était le problème.
De la Loire à l’IJssel, de l’Euphrate à la Seine l’eau de la terre souffrait, l’eau du monde peinait. Mère de toute vie elle en avait assez de toujours plus lutter, de sauter, de filer et de se retourner pour plus s’oxygéner, pour mieux aimer les hommes. Ils avaient oublié que vivre est partager les talents, qualités et tous les dons reçus. Ils avaient oublié que si l’intelligence épouse l’insouciance, l’eau souffrait de la soif, que la vie bafouillait et que l’air étouffait.
Connaissez-vous Beynac, dominant la Dordogne?
C’est là que commença cette étrange anecdote. Et c’est là qu’aujourd’hui tout commence et renaît. S’appelant Espérance, c’est elle qui renonça en décidant d’offrir aux hommes, juste une chance.
Comme un tendre sourire, comme un souffle d’amour, Espérance a bougé, la Garonne et le Rhône; de l’Ouest au Grand Nord, les torrents ont repris, les eaux vives écumé et l’air a respiré, la vie s’est exprimée… Et comprenons-le bien.